EUROPEAN POKER TOUR DE DEAUVILLE DU 31 JANVIER AU 6 FEVRIER 2012
    Cette année l’EPT de Deauville comptait pas moins de 889 joueurs provenant de 51 pays différents, un peu moins de participants que l’an passé (891).

    Jamais je n’ai entendu autant de langues différentes à une table de poker et souvent pendant cette semaine d’hiver j’ai eu l’impression de jouer dans un pays de l’Est comme la Hongrie, la Bulgarie, la Tchéquie, la Pologne, la Russie... D’ailleurs les Ruscofs n’adorent-ils pas Deauville et ses paillettes, son casino aux milles lumières et son hippodrome, à une nuance près tout de même : les milliardaires russes lui préfèrent Courchevel où ils ont construit et acheté de somptueux chalets de rêve.

    En réalité Deauville c’est plutôt pendant l’été qu’ils la préfèrent, assidus aux ventes de Yearlings, choisissant une vie de palace grandiose.

EPT 2012 Deauville

    Le deuxième jour la neige a recouvert la ville de son manteau de velours blanc avec 20 cm d’épaisseur. Pendant la matinée je suis passé au marché juste devant le Mercure : pas de problème pour le poissonnier, sa marchandise gardait toute sa fraicheur, mais je trouvais le cabillaud un peu cher à 42€ le kg.

    A midi pimpante j’avais rejoins les 520 survivants prêt à en découdre bec et ongles mais malheureusement après 2 coups nazes, il ne me restait que des figues, mon stack réduit à sa plus simple expression devenait la convoitise des tous ces jeunes rapaces.

    En fin de soirée, je sautai, allant rejoindre au bar mon ami le chanteur Christophe. On s’est consolé en se remémorant le bon vieux temps au Bar du Cagnard à Cavaillon juste sous le Rocher, à l’époque où Dédé Blanc rayonnait sur le monde des boules et du poker, le célèbre Dédé et son fidèle écuyer l’inénarrable Pacho, son porteur de boules et tête de turc préférée.

    Tous les champions du monde de boules étaient là : Luchesi, Othello, Japon, Mistral convertis au petit jeu, un dérivé de la pétanque que l’on joue de 4 à 6 mètres avec une pièce de monnaie comme cochonnet et où tout est permis même de jouer dans les pentes, escaliers et les racines d’un grand platane qui trônait au Cagnard.

Le cash coulait à flot un peu comme au Poker maintenant, les parties pouvaient démarrer à un baton (1500€), on jouait tard dans la nuit à la lumière des phares de voiture puis après on allait chez Mémé la taulière du Cercle de Cavaillon, on tapait le carton au poker fermé jusqu’au petit matin. Ce temps est révolu, l’oseille qui sentait bon, les clandés des arrières cuisines de bar, les parties de Passe anglaise dans les caniveaux, tout à disparu pour laisser la place à un flambe contrôlé et assagi, aseptisé et ponctionné par des prélèvements dévastateurs.

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    Le troisième jour beaucoup de favoris ne l’étaient plus Cohen, Benyamine, Fitoussi, Clemenson, Darcourt avaient rejoint le rail, le Day 4 s’annonçait terrible avec 128 joueurs payés. La Finale se dessinait peu à peu, 8 joueurs seulement allaient se partager le « Graal » et ressentir l’infinie jouissance de sortir de l’anonymat en passant à la télé.
    L’Hiver à Deauville, la très élégante et cossue station balnéaire crée par le Duc de Morny devient un lieu de retraite très prisé de la vieille aristocratie du 16ème qui a pris l’habitude de passer ses weeks au Normandie où la marmaille dorée peut patauger royalement dans la piscine couverte dont l'architecture dont la verrière date du début du siècle.

    Pendant l’austère et rigoureux hiver à Deauville, l’unique semaine où ca bouge un peu, c’est pendant l’EPT. La horde sauvage des joueurs venus de la planète entière déferle tous azimuts sac à dos et baskets : ceux sont les nouveaux chevaliers du hasard des temps modernes.

    Certains restaurateurs préfèrent fermer à cette occasion se privant d’une recette certaine car ils ne supportent plus la vue de ces nouveaux riches mal fagotés, arrogants et bruyants, d’autres les refusent carrément, toutefois cette jeunesse turbulente et flambeuse crée une animation incontestable qui contraste avec le reste de l’année et redonne à la ville « Old Fashion Lady » une nouvelle vigueur et fraicheur qui la dépoussièrent.

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    Pendant le Day 1A je luttais dans un sat de qualif qui se termina très tard, il n’en finissait plus, il manquait trois joueurs out pour la belle, finalement pendant la dernière pause, l’ensemble des joueurs décident de mettre la main à la poche en versant une quotepart de manière à ce que les 3 derniers fussent intégrés à la bulle.

    C’est ainsi que je me retrouvais le Day 1B dans le main évent.
Le hasard voulut que Kursevich, futur vainqueur, soit à ma table. Evidemment à cet instant je ne pouvais imaginer que pendant toute une journée je croiserai le fer avec le futur champion de l’EPT. Quelques bonnes inspirations et un stack qui grimpe, j’ai joué seulement 2 coups contre le Biélorusse, il paraissait très calme et particulièrement concentré.

EPT 2012 Deauville

    62% des finalistes étaient français alors qu’au départ dans la masse des 889 joueurs il n’y en avait que 54% ce qui démontre encore la formidable progression de notre pays qui désormais obtient régulièrement des bracelets et places en finale des main events.

    Mon premier adversaire du Day1, Kursevich, le biélorusse domine les débats, seul contre tous car un clan naturel s’est formé, pendant les pauses, les coachs conseillent de nouvelles stratégies, le « Meta game » touche des sommets inaccessibles.

    Bientôt, après vint l’élimination du brillantissime Pagano reste alors l'unique qualifié du net Paul Guichard (à ne pas confondre avec le célèbre Jeannot Guichard qui lui se trouve être le bienheureux héritier de la multinationale de grandes surfaces Casino).

    Malgré quelques élans de révolte et rébellion Paul Guichard sombre mais avec les honneurs, un brelan de 5 contre une couleur, Kursevich déjà troisième de l’EPT de Berlin en 2011 remporte le trophée de Deauville dans le froid et la neige devenus ses alliés invisibles.

P. G.
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